Stefan Wolpe, Donald Martino, Allen Anderson, Morton Feldman : Aleck Karis a illustré dans son aventureuse discographie l’avant-garde américaine avec autant de discrétion que d’intelligence, son piano se fondant dans le jeu d’ensembles à géométrie variable. Mais chez Bridge, jeune homme, il avait signé un récital où brillait un Carnaval de Schumann affirmé, suite de portraits brossés avec esprit.

Quel bonheur de le retrouver aujourd’hui pour un plein album Debussy. J’aurais pu croire que ses Etudes seraient acérées, cubistes, montrant les modernités du texte, mais non, il les joue pour le seul plaisir, son toucher si équilibré, son art des couleurs l’immergeant dans l’opulence harmonique que Debussy y aura inventée, créant ici le pendant musical des divagations versicolore des peintres fauvistes.

Ce ne sont plus du tout des Etudes, mais des impressions qui s’écoutent comme on contemple. Cette simplicité chatoyante serait presque silencieuse à force : on n’entend plus, on voit. Placer les miniatures de Children’s Corner en regard, c’est poursuivre cette exposition, de l’eau-forte de Jimbo’s Lullaby au fusain discret, magique à force de poudroiement, de The Snow is Dancing.

Debussy lui va si bien, il faut qu’il y persévère, je veux ses Images, ses Estampes, ses Préludes, sa Suite bergamasque.

LE DISQUE DU JOUR

Claude Debussy (1862-1918)
Etudes, Livres I & II, L. 143
Children’s Corner, L. 119

Aleck Karis, piano
Un album du label Bridge Records 9529
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Photo à la une : © DR