Tropisme Karłowicz

C’est une injustice à laquelle je ne me résous pas : l’œuvre charnière que représente le catalogue relativement bref de Mieczysław Karłowicz dans l’histoire de la musique polonaise du XXe siècle reste ignoré hors de Pologne : au concert, on n’entend quasiment jamais ses œuvres, mais son irrésistible Concerto pour violon a séduit depuis peu nombre de grands archets qui l’ont enregistré, j’en ai rendu compte ici plus d’une fois.

C’est encore de Pologne que nous vient l’écho de deux concerts où Grzegorz Nowak et le Royal Philharmonic Orchestra donnèrent ses deux chefs-d’œuvre. Alena Baeva délivre une interprétation lyrique, effusive du redoutable Concerto qui est devenu une affaire de femmes : Wanda Wiłkomirska, Kaja Danczowska, Jennifer Pike, Tasmin Little se le sont approprié, Alena Baeva lui apporte un charme conquérant, quelque chose de très libre dans l’effeuillement des ornements du Finale, à vrai dire une ivresse que l’effusion du concert suscite tant l’œuvre est irrésistible : l’enthousiasme du public le proclame assez.

La grande Symphonie « Renaissance » écrite juste avant le Concerto est la proclamation de la foi de Karłowicz en l’avenir de son pays, partition quasi philosophique dont l’immense orchestre a quelque chose de mahlérien.

Partie d’un Lent-sombre crépusculaire, elle progresse vers la lumière, chemin d’une âme qui cherche la salvation. Grzegorz Nowak la fait fluide de tempos mais âpre d’accents, conscient de l’importance historique d’une œuvre qui marqua le jeune Szymanowski et fut l’opus symphonique majeur ultime du romantisme polonais.

LE DISQUE DU JOUR

Mieczysław Karłowicz (1876-1909)
Concerto pour violon et orchestre en la majeur, Op. 8
Symphonie en mi mineur, Op. 7 « Renaissance »

Alena Baeva, violon
Royal Philharmonic Orchestra
Grzegorz Nowak, direction

Un album du label Institut Frédéric Chopin Varsovie NIFCCD067
Acheter l’album sur le site du label de l’Institut Chopin

Photo à la une : le chef d’orchestre Grzegorz Nowak – Photo : © DR