Opus 1

Ce n’était pas une légende, Kirill Petrenko n’apprécie guère le disque. Aujourd’hui qu’il est à la tête des Berliner Philharmoniker, plus encore qu’hier !, mais il commence à se faire violence. Dans le cadre d’une vaste anthologie John Adams le seul Wound-Dresser avec Georg Nigl avait jusque-là paru – contribution modeste.

Mais voilà qu’il autorise la publication d’une Pathétique donnée en mars 2017 : elle fera couler beaucoup d’encre. L’absence d’effets, les phrasés retenus, les rythmes précis et tranquillement implacables forcent les Berliner à ne pas s’écouter : Petrenko dissipe leur addiction à l’hédonisme, leur tentation narcissique qui ne s’est jamais effacée depuis l’ère Karajan ; il tire du quatuor des sonorités minérales, en fait un glacis sur lequel les bois et les vents chantent en profondeur. Quelle nuit d’orchestre dans l’Adagio, et quelle nuit tout court dans le lamento où plus une lumière ne luit : à la coda l’orchestre s’éteint littéralement.
Qui avait déjà fait ainsi à Berlin ? Ah oui !, Claudio Abbado dans les ultimes mesures de la Neuvième de Mahler.

On l’aura compris, les deux mouvements médians n’ont plus rien de nostalgique (le con grazia est amer) ou de spectaculaire (le molto vivace reste tenu, hautain, tendu, n’implosera pas, Petrenko ne veut pas être Svetlanov, ni Mravinsky), c’est la grande ligne sostenuto, sculptée qui les enveloppe tous dans cette même élégie de cendre, symphonie-requiem probablement inoubliable.

Suffira-t-elle à le réconcilier avec le disque ?

LE DISQUE DU JOUR


Piotr Ilitch Tchaïkovski (1840-1893)
Symphonie No. 6 en si mineur, Op. 74 « Pathétique »

Berliner Philharmoniker
Kirill Petrenko, direction

Un livre-disque au format italien du label Berliner Philharmoniker BPHR190261
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Photo à la une : le chef d’orchestre Kirill Petrenko – Photo : © DR