Pastorale

Daphnis et Chloé aura vécu cette réduction malheureuse au monde du concert, Lever du jour et Bacchanale, mais le projet de Ravel était autre.

Grand Ballet certes, qui, au sein même de l’entreprise de Diaghilev, donnait en sorte par anticipation une réponse à la révolution majeure du Sacre du printemps. À Stravinski, le primitivisme fantasmé, pour Ravel l’élégance attique du « roman » de Longus.

Au fond, sous un habit de grand ballet (et de grand orchestre et de grand chœur à bouches fermées), Daphnis et Chloé choisit le parti de la pantomime : tout le jeu entre les amoureux n’est que cela, de la musique au millimètre pour chaque pas, chaque geste des danseurs, orchestre fuligineux, écrit avec une plume impondérable, qui oppose une vraie musique de chambre de grand déploiement aux trois épisodes verticaux qui en sont la négation : procession votive, rapt des brigands, Bacchanale.

Aziz Shokhakimov fait entendre cette césure, il tire surtout de ses Strasbourgeois des subtilités de phrasés, d’accents, de rythmes, qui le montrent plongé dans le texte : la lecture est d’une précision !, mais trop souvent en éloignant le ballet, sans pourtant tirer à la symphonie.

Cet entre-deux pourra être reproché, mais partition en main l’écoute dispense un plaisir que les Ravéliens qui connaissent leur Pierre Monteux sauront savourer.

LE DISQUE DU JOUR

Maurice Ravel
(1875-1937)
Daphnis et Chloé, M. 57

Chœurs de l’Opéra National du Rhin
Orchestre Philharmonique de Strasbourg
Aziz Shokhakimov,
direction

Un album du label Warner Classics 5021732628237
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Photo à la une : le chef d’orchestre Aziz Shokhakimov –
Photo : © Grégory Massat