Torpide

Sir Simon Rattle fut toujours gourmand de musique française, son album Debussy, dès son temps de Birmingham (Images, Jeux) l’aura prouvé, ses Ravel épurés surprennent toujours en bien aujourd’hui comme ceux de ce concert donné au Barbican le 13 janvier 2016 Continuer la lecture de Torpide

La Dame en noir

Le salon de musique de Tchaïkovski : il vient de faire une gâterie à Hermann qui le quitte après avoir remonté le perroquet automate sifflant dans sa cage dorée l’air de Papageno façon boîte à musique. Une provocation ? À peine Continuer la lecture de La Dame en noir

Quarante-huit Préludes

Voici quelques lustres, Boris Berman avait enregistré pour Chandos un album Debussy joué à plein clavier, charnel, dense de chants et de couleurs, qui m’avait surpris. Images, Pour le piano, des Epigraphes antiques animés, puis plus rien, du moins chez Debussy. Continuer la lecture de Quarante-huit Préludes

Concerto-Tempête

Le plus redoutable des concertos du grand répertoire ? En tous cas, le Deuxième de Brahms n’effraie pas Nelson Goerner pour ce qui est des doigts – il les faut quasi aussi endurants que pour le Premier – comme pour la conception, si difficile : ces quatre mouvements qui sont quatre ballades font preuve d’une liberté d’invention, déploient un discours complexe, et explorent à chaque fois des univers différents. Au cœur, cet Andante intemporel où chante d’abord le violoncelle (et pris ici absolument andante, ce qui signifie « allant »).

Geste droit, piano tenu mais sonore, phrasés taillés aux ciseaux, Goerner affronte l’écriture de Brahms sans souci de briller, il en assume le ton sombre, la profusion du jeu d’accords, les trilles de trompettes avec une concentration qui transfigure sa sonorité en général plutôt fermée.

Dans le plus sombre de son clavier, une lumière s’instille, dorant les harmonies graves dont Brahms fait son miel. Très belle version, singulière, qui s’inscrit parmi les meilleures, mais qu’il faudra aborder en la sachant tendue, intense, sans les effets de pastorale que tant de pianistes y auront sollicités, comme si justement les tempêtes du Premier Concerto se prolongeaient ici, j’espère bien qu’il l’enregistrera avec les mêmes partenaires.

Car l’Orchestre Symphonique de la NHK de Tokyo et Tadaaki Otaka participent au premier chef à la réussite de l’album, mariant intimement leur discours et leurs timbres avec ce clavier entêté, lui dessinant des paysages tempétueux (écoutez le decrescendo avant la coda de l’Allegro non troppo), ouvrant grands les espaces de cette symphonie avec piano.

LE DISQUE DU JOUR

Johannes Brahms (1833-1897)
Concerto pour piano et orchestre No. 2 en si bémol majeur, Op. 83

Nelson Goerner, piano
NHK Symphony Orchestra, Tokyo
Tadaaki Otaka, direction

Un album du label Alpha Classics 395
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Photo à la une : © DR

Musiques de l’avenir

Belle idée : confronter les pièces méditatives, de forme libre, d’harmonies divagantes, où Liszt aura projeté son piano vers les temps futurs, nocturnes italiens de la Deuxième Année de pèlerinage ou les pièces de la fin, avec le nouveau monde dont Debussy ouvre grand les portes dans son Premier Livre de Préludes.

Christian Erny, tout juste trentenaire aujourd’hui (il avait vingt-huit ans lors de l’enregistrement), aura réalisé avec son premier album un vrai disque pour les musiciens. Son piano ample, où tout est porté par un corps harmonique surprenant, rappelle celui des grands anciens.

La concentration minérale des sonorités de son Premier Livre m’évoque rien moins que Claudio Arrau, l’absolue rectitude du texte, l’absence de toute tentation illustrative, la densité des phrasés – écoutez à quel point Voiles est dessiné – seraient déjà la signature d’un grand artiste.

Mais il y a une vision supplémentaire, un art de créer le mystère qui fait défaut si souvent aux interprètes de Debussy aujourd’hui. Le temps est suspendu plus d’une fois, même dans les Préludes rapides : Le vent dans la plaine hypnotise, qui ramène un rire des lointains. Et lorsque l’espace de ce clavier s’ouvre, c’est une poésie saturée d’intensité expressive qui emplit Les sons et les parfums dansent dans l’air du soir, immatériels mais pourtant incarnés, où le vaste vaisseau harmonique de La Cathédrale engloutie.

Au point que les Liszt passent malgré eux, malgré leurs parfaites réalisations, derrière ce Premier Livre qui ne cesse de me fasciner : je l’écoutais en regard du Second Livre de Pollini, leur trouvant des connivences. Alors Christian Erny, s’il vous plait, votre Deuxième Livre !

LE DISQUE DU JOUR

Les parfums, les couleurs et les sons se répondent

Claude Debussy (1862-1918)
Préludes, Livre I, L. 117
Franz Liszt (1811-1886)
Années de pèlerinage, 2è année, S. 161 (extraits : Sposalizio, Il pensieroso)
Unstern! Sinistre, disastro, S. 208
En rêve (Nocturne), S. 207

Christian Erny, piano

Un album du label Solo Musica SM238
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Photo à la une : © DR