Amériques imaginées

Le programme parle de lui-même, il suffirait quasi à commander l’achat de l’album, pourtant l’audition glisse quelques bémols. La section centrale de l’Ouverture Cubaine montre cette attention singulière à l’harmonie, ce sens des atmosphères, et une inclinaison particulière vers un certain lyrisme qui du coup refuse le feu d’artifices de l’intrada et plus encore celui de la coda : j’entends que le duo « pense », je ne devrais pas m’en plaindre si les idées néobaroques du Dumbarton Oaks Concerto ne sonnaient si mécaniques.

Stravinski s’en arrange. Moins Colin McPhee dont les gamelans manquent d’ivresse, et l’opus de John Adams qui nomme l’album, joué comme la musique répétitive qu’il n’est qu’en apparence : la transe ne viendra pas, et pas plus pour l’opus de Rzewski dont le sourd motorisme est si difficile à conduire.

Le plus beau du disque ? La transcription limpide à force de simplicité d’El Salón México, acte d’admiration signé Leonard Bernstein envers son collègue Aaron Copland, et là le duo est à son affaire, poétique et dansant, savoureusement accordé de timbres, de phrasés, d’accents à l’image plus vaste qu’en offre l’orchestre, dont on croit entendre l’écho.

LE DISQUE DU JOUR

Hallelujah Junction

George Gershwin (1898-1937)
Cuban Ouverture (version pour 2 pianos : Gregory Stone)
Igor Stravinsky (1882-1971)
Concerto en mi bémol majeur, K060 « Dumbarton Oaks » (version pour 2 pianos)
Aaron Copland (1900-1990)
El Salón México (version pour 2 pianos : Leonard Bernstein)
Frederic Rzewski (1938-2021)
Winnsboro Cotton Mill Blues (version pour 2 pianos)
Colin McPhee (1900-1964)
Balinese Ceremonial Music
John Adams (né en 1947)
Hallelujah Junction

Lukas Geniušas, piano
Anna Geniushene, piano

Un album du label Alpha Classics 1122
Acheter l’album sur le site du label Alpha Classics ou sur Amazon.fr ― Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com

Photo à la une : le pianiste Lukas Geniušas et la pianiste Anna Geniushene, également son épouse – Photo : © Aivaras Ruginis